Avant de partir en voyage, Caro,
copine de Bordeaux, m’avait parlé de son propre voyage en Asie et de son
passage par Vipassana, une technique de méditation indienne et ancestrale. Il
existe des centres Vipassana un peu partout dans le monde, qui proposent des
stages intensifs de 10 jours pour apprendre la technique. Caro m’a prévenu que
le stage était très difficile mais intéressant, donc je me suis inscrite !
Je me rends donc au Dhamma Mahima,
près de Pyin Oo Lwin, pour prendre part au stage. J’avais conscience que la
discipline était contraignante donc je m’étais préparée psychologiquement à
fournir des efforts. En gros, les règles sont
* Lever à 4h
* 11h de méditation par jour
* Pas de nourriture après 12h
* Pas de cigarette (contrainte qui m’inquiétait le
plus)
* Pas de communication avec l’extérieur
* Pas de distraction (livres, musique, ordinateur, téléphone,...)
* Pas de communication entre les stagiaires
Arrivée au centre la veille du
début des cours, il y a environ 120 participants, seulement 7 étrangers et ¾ de
femmes. Il ne s’agit pas d’un beau temple comme je l’imaginais mais d’un
alignement de petits bungalows en béton. La salle de méditation est également
en béton, murs nus et austères, comme la salle des repas. Il y a une jolie
pagode un peu plus loin, mais l’accès est réservé aux anciens élèves. Pour le
côté mystique du temple bouddhiste, c’est loupé… Avant le premier cours, nous
devons remettre tout objet électronique (du coup, pas de photo, désolée…),
livres, bijoux, passeport, portefeuille,… Bref tout sauf les vêtements et la
trousse de toilette.
A 18h, diner, puis nous
participons au premier cours. Assis en tailleur sur un petit coussin, nous
écoutons le prof passer une cassette audio qui nous demande de répéter après
lui un texte dans une langue inconnue. Nous ne comprenons pas le contenu mais
il s’agit d’un prêtage de serment. Niveau échange avec le prof, c’est moyen… Puis,
la cassette audio nous donne les consignes : il faut focaliser son
attention sur sa respiration, essayer de savoir si l’air passe dans la narine
gauche ou la droite. Pas évident, mais au bout d’un moment on y arrive ! 2h
de pratique plus tard, au lit, en silence.
Le lendemain, lever à 4h donc et
la journée se déroule selon le planning… en silence. Hormis les 2 repas, le
discours de la cassette audio le soir et les temps de pause où on ne peut rien
faire à part dormir ou marcher entre les bungalows, c’est méditation toute la
journée ! Pas de nouvelles consignes, il faut focaliser son attention sur
sa respiration. 11h à penser à ses narines, c’est long…
L’ambiance est
étrange : nous sommes censés nous sentir isolés, en repli sur soi, mais le
centre est tout petit et nous sommes 120 participants (2 personnes par bungalow
de 5m2). Nous ne devons pas nous parler ni même échanger un regard. Une telle promiscuité
sans avoir le moindre échange me met très mal à l’aise.
Mais focaliser son attention vide
le crane, c’est plutôt relaxant et pour le moment j’arrive à suivre. Attendons
la suite.
Jour 2, identique au jour 1.
Excepté que les consignes de la cassette audio précisent qu’il faut essayer de
sentir le toucher de l’air sur sa peau. A la fin de la journée, début de mal de
dos, de mal de jambes et grosse fatigue d’avoir maintenu son attention toute la
journée. Et aussi début d’ennui parce qu’on arrive assez rapidement à ressentir
ce qu’on nous demande, de plus en plus facilement, et que je vois mal l’intérêt
de répéter sans cesse le même exercice.
Jour 3 : une nouvelle
consigne, en plus de la respiration, il faut essayer de ressentir toutes les
sensations au niveau de son nez. A cause de la fatigue et des douleurs
physiques, il devient difficile de rester concentrer. D’autant qu’apparemment
le régime alimentaire ne convient pas à tout le monde, ce qui génère bruits et les
odeurs dans la salle de méditation. Et à part méditer, il n’y a absolument rien
à faire ! Le pire pour moi est que nous devons effectuer le même exercice
heure après heure sans avoir aucune explication de pourquoi nous faisons cela,
pourquoi si longtemps, pourquoi toutes ces contraintes ! Mais bon,
patience…
Jour 4 : après m’être à
nouveau concentrée sur mon nez tout la journée, je commence à me demander ce
que je fais là, à me sentir fatiguée et vaguement déprimée. Enfin, le discours
du soir nous explique que maintenant que nous avons appris à focaliser notre
attention (c’était donc ça !), nous pouvons commencer la VRAIE pratique de
Vipassana. Chouette ! Cela consiste
à… faire exactement la même chose mais sur la totalité du corps, pour ressentir
les différentes sensations. Contrainte supplémentaire : il est désormais
interdit de changer de position pendant les 3 sessions de groupe journalières,
qui durent 1h chacune. Le monsieur explique que c’est de cette façon, en
travaillant avec obstination et en s’abstenant de réagir aux sensations
physiques (joue qui gratte, mal de dos, fourmis dans les jambes parce que le
sang ne circule plus) que « les lois
universelles de la nature » se révèlent à nous et qu’on atteint « la purification de l’esprit ». Je
suis un peu septique mais bon, je vais me coucher sur ma planche en bois
recouverte de 2cm de mousse, et j’essaierai demain.
Jour 5 : lever 4h, toilette
au seau d’eau froide, début de la méditation à 4h30. Si on parvient à faire
abstraction de la douleur physique, c’est plutôt intéressant de balayer son corps
de la tête aux pieds et d’en ressentir toutes les sensations ! Je peux
sentir le sang circuler dans le bout de mes doigts ou la pression de
l’élastique de mon pantalon !
Mais après 2h, impossible de rester concentrée. Il est interdit de bouger,
de sortir de la salle, de faire quoi que soit… Je cogite, je me sens fatiguée et franchement déprimée, j’ai du mal à comprendre l’intérêt final du stage,
d’autant que le discours tenu par le monsieur de la cassette me parait plein d’incohérences, et le prof ne parle pas assez bien anglais pour fournir des explications. Apprendre à méditer, faire des efforts pour y parvenir,
OK. Mais cette espèce de pénitence qui consiste à accepter sa souffrance dans le but obscur de « purifier mon esprit »,
non merci… Bref, je me rends compte que ça ne va pas être possible de continuer encore 6 jours à ce rythme.
Après 4 jours d’efforts acharnés pour
focaliser ma pensée, je décide de quitter le centre, avec mal au dos, mal aux jambes,
mal au ventre et franchement perturbée par cette expérience… Peut-être que j’ai
loupé tout le sens de l’enseignement et que je suis passée à côté de la vérité
universelle…
J’ai tout de même appris une
technique de méditation plutôt agréable et relaxante, si elle est pratiquée
avec un rythme raisonnable. Et gros point positif, j’ai passé tellement
d’énergie à observer mes narines que je n’ai même pas pensé à mon manque de nicotine !
c'est mon article préféré !! jojo
RépondreSupprimerAh oui, pourquoi ?
SupprimerMoi c'était pas ma partie préférée...
s'attaquer à Vipassana sans avoir jamais rien tenté du côté du yoga ou de la méditation "soft", le pari était risqué, mais courageux! tenir 4 jours c'est déjà un exploit! le positif c'est que tu en a retiré quelques "trucs" pour te centrer sur toi même. Très précieux dans la vie occidentale!! J'espère que les douleurs se sont atténuées......quant au centrage sur le nez et les problèmes de digestion, y a pas un petit lien ? :))M.
RépondreSupprimerHello Choup
RépondreSupprimerJe vais mieux, j'ai pu rattraper mon retard de lecture de ton journal. Quand on voit des photos de voyage on oublie souvent les nombreuses heures de transport et d'attente qu'il y a derrière. ça transparait bien dans ton blog, c'est bien. Difficile aussi de relater les rencontres que l'on fait mais c'est normal c'est plus intime.
En tous cas, apparemment, tu as été servie pour les 2.
Tu m'as tué avec ton stage de méditation.
Moi qui ai du mal à tenir une position assise plus de 10 minute au yoga, je me demande encore comment tu as pu tenir 4 jours à ce régime.
C'était un peu de la folie. Bravo miss zen.
Y'a un truc qui me choque quand même, c'est de se forcer à tenir la position même quand la circulation du sang est bloquée. La prof de yoga nous dit toujours que quand la douleur arrive il ne faut pas insister.
J'ai cru comprendre que tu allais en Indonésie après. C'est vrai ?
Bisous
Je suis en Indonésie depuis 2 jours :)
SupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
Supprimerla chance !
Supprimer